Le ruisseau
Ruisseau de mes amours ton chant matinal égaye la forêt et mon coeur,
Et dans ta symphonie ondulante l'oiseau au plumage verdâtre salue ton réveil.
Que de détours tu empruntes pour suivre inlassablement ton lit bordé de fleurs,
Moi pauvre diable de la berge je te contemple, tu es ma merveille.
Rappelle-toi, tu m'as vu grandir insouciant et heureux, et de mon plus jeune âge,
Faisant ricocher des cailloux sur ton manteau transparent, mes journées je passais.
Que diable ! Voilà bien un garnement qui transperce ma peau, je lui donnerai gage
Et pour son pardon m'ôter ces quelques souches qui font de mon cours un lacet.
Me voilà homme mon ruisseau, me voilà sage, et sur ton onde sans cesse renouvelée,
Par dessus le pont de pierre, je chuchote, murmurant toujours le même voeu,
Regardant les tourbillons dansant et espérant voir son visage au sourire immaculé.
Ma patience sera la tienne, et de ton égard comme récompense quelques aveux.
juan
Le pêcheur amoureux
Sur l'herbe assis au bord de l'eau j'ai posé ma canne
Attendant impatiemment l'arrivée de la brillante ablette.
Le soleil me picote les yeux me réchauffant l'âme
De ce vent du nord dont souffrent les violettes.
Je regarde l'eau qui danse sautillante et qui chante,
Et dans sa profondeur transparente les poissons d'argent
S'amusent en tournoyant sur l'éche moribonde,
Dans les éclats lumineux de leurs corps étincelants.
Et attendant l'ablette insouciante, dans ma tête j'ai posé
Quelques mots coloriés de tendresse et d'espoir, et qu'en fin de journée
Je soufflerai au vent ces phrases demi osées,
Un pincement au coeur de cet amour né.
Le soleil a fermé ses lourdes paupières, et le vent s'est calmé
Emmenant l'ablette joyeuse parmi les pierres noyées,
Et moi pliant ma canne sous ce ciel étoilé
Je rentre le coeur gai, de l'ablette sauvée, et du poème envoyé.
juan
Le bonheur
Toi le bonheur pourquoi es-tu comme l'arc en ciel d'hiver
Qu'il te faille de la pluie et du soleil, mariage de pleurs et de rires,
Quand tes larmes mouillent nos joues de leurs pas amères
Quand nos cils se sèchent pour le meilleur et pour le pire.
Jours heureux où l'on ne soucie guère du monde
Quand nos âmes s'envolent papillonnant aux chantefables,
Ton soleil nous enchante et nos coeurs vagabondent
D'un pas joyeux dans ta valse entrainante aux notes folles.
Pluie aux gouttes d'eau fraîche pour tes couleurs tendres,
Douce violence pénétrant nos coeurs perdus,
Perles scintillantes descendant du ciel d'une main sombre
Quand nos coeurs deviennent gris, quand ta fraicheur nous tue.
Bonheur, mélange de soleil et de pluie, ton nom est grandiose,
Et assis regardant l'aurore du temps, je te salue les bras levés
De tes larmes perlées qui endeuillaient mes jours moroses,
De tes rayons ardents qui ont promené ma destinée.
Juan
La tombe du poète
Allées au gravier blanc et bruyant sous mes pas feutrés,
Le bruit glisse sur les petits cailloux comme un serpent sur l'herbe mouillée,
Et l'angélus aux cloches d'argent couvre tintonant l'air frais
De ce jour qui se lève quand je marche encore à demi éveillé.
La bise me picote les joues les colorant comme deux fraises,
Et ma canne bouscule les gravillons de va-et-vient nonchalants,
Creusant des trous de grillons jusqu'à toucher la glaise
D'un son métallique faisant fuir les bruants.
Ta demeure est là mon pauvre poète, sans fleurs ni couronnes,
Une pierre nue comme l'enfant né, polie par le vent et la pluie,
A l'éclat mat et triste comme ces jours sombres d'automne
Où tu me faisais rêver de tes phrases quand je me sentais dans l'oubli.
Les gens traversent l'allée indifférents, sans se soucier qu'un prince en exil
Compose à deux pieds sous cette terre humide des phrases d'amour,
Pour moi sa seule amie qui l'a toujours aimé dans cette ville,
Où déjà étant petits tous les deux, on nous voyait ensemble tous les jours.
Point de fleurs ni couronnes c'était ton souhait, juste un marbre blanc,
Et comme seul ornement les initiales de nos prénoms
Se mariant toutes les deux d'un lacet presque transparent,
Pour garder notre secret aux yeux de ce monde et de leurs incompréhension.
Juan
La fée Isa
Le jardin s'égaye de mille couleurs de sa présence tendresse,
Et pour elle la rose de satin s'est vêtue, fragile et parfumée.
Que de bruits et d'agitations ! De son nid l'oisillon guettait son arrivée,
Que diable ! Ecartez-vous, crime serait de ne point voir la maîtresse.
Le grillon réveillé, les pattes engourdies, s'étirant de son trou sortit admirer la déesse.
Attendez princesse ! De ce pas m'en vais réveiller la dame aux ailes de diamants,
Celle qui chantonne tout l'été les yeux au levant, oubliant sa détresse
De ne point rencontrer un galant comme amant.
Venez dame cigale, admirer notre fée avant qu'elle ne disparaisse,
Son cortège est dans le jardin, serpent d'éclat et de lumière
Nous émerveillant et ôtant notre quotidienne tristesse,
Son amour nous inonde et sa voix de velours nous éclaire.
Vite ! De votre chaumière sortez admirer la fée Isa,
Frottez vos ailes lui offrant votre plus belle chanson
Avant qu'elle ne reparte dans les cieux vers Mirza,
Dans sa robe de reine découvrir d'autres horizons.
Juan
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